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petites   histoires  et  grande  histoire

 

 

5- Evangélisation  des  populations   rurales

 

 

           « Si la mainmise romaine avait apporté des modifications profondes dans les mœurs des citadins, elle n'affecta guère la campagne gauloise. C'est au christianisme qu'allait incomber la tâche de la bouleverser de fond en comble. Pour les Romains, seules comptaient les considérations d'ordre pratique, et leur principale préoccupation demeurait toujours l'intensification du rendement fiscal dans toute la mesure du possible. Pour le reste, pourvu que le paysan s'acquittât intégralement de son dû, on lui laissait la faculté de mourir de faim à sa convenance. On ne touchait pas à ses coutumes, à ses traditions séculaires, à des croyances qui lui avaient permis de se créer tout un monde irréel et mystérieux, devenu pour lui aussi familier que la plus tangible des réalités. » [dans « Histoire des paysans de France » / Gérard Walter]

           Toutes les croyances qui composaient la vie spirituelle du paysan gallo-romain se trouveront vouées à la disparition lors de l'avènement du christianisme, mais les paysans gaulois défendront pied à pied leurs divinités et leurs sanctuaires. Pour parvenir à s'imposer, la nouvelle religion devra vaincre une résistance acharnée. Une âpre et longue lutte s'engagera, qui durera plusieurs siècles, au cours desquels la plupart des fêtes païennes seront peu à peu remplacées par des fêtes chrétiennes placées aux mêmes dates du calendrier, semant ainsi la confusion parmi les populations fraîchement converties. Le peuple gallo-romain, dont l'âme était celte depuis plusieurs siècles, n'étant pas privé des fêtes traditionnelles qui le reliaient au cycle de la nature, fut progressivement « dépaganisé » et « christianisé » par une Eglise catholique qui lui donna en même temps un cadre administratif stable et rassurant.
           Les pratiques religieuses celtes rythmaient la vie quotidienne, laquelle était inscrite dans un calendrier qui se comptait, non en jours, mais en nuits, l'année finissant le 31 octobre, date approximative du changement de climat entre l'été et l'hiver. Ainsi, à la pleine lune la plus proche du 31 octobre, les populations célébraient la fête de Samhain, défaite de Muck Olla, dieu du soleil, de l'été, des moissons et donc dieu de la vie, face au dieu Samhain, dieu des ténèbres, des nuits longues et froides, dieu de la mort. Cette célébration servait d'exutoire à la peur qu'engendrait dans ces populations paysannes la perspective de l'hiver et de la famine possible. Et comme Samhain triomphait, on disait qu'il emmenait avec lui sur la terre les âmes des défunts de l'année qui revenaient hanter les chaumières. L'Eglise fixa la fête de la Toussaint au 1er novembre, ce rite finissant par supplanter l'autre, enraciné dans les mémoires. La Saint Jean et la fête de la nativité du Christ, autres fêtes chrétiennes, furent placées aux solstices d'été et d'hiver, et c'est ainsi que des traditions païennes furent progressivement remplacées par des croyances chrétiennes.
           Il est vraisemblable que la Gaule fut touchée par la nouvelle religion dès la fin du Ier siècle après J.-C. Toutefois, le christianisme ne s'implanta que lentement dans les campagnes gauloises. Il faudra attendre le milieu du IIIe siècle siècle pour trouver mention d'un évêque à Trêves ou à Reims. A Metz, c'est vers 275-280 que St Clément devint le premier évêque de la cité des Médiomatrices. Cependant, l'historien Robert Parisot que « l'on peut admettre que, dès le second siècle, les villes de la Belgique moso-mosellane ont possédé de petites communautés chrétiennes, formées surtout d'étrangers, dirigées par de simples prêtres et relevant de l'évêque de Lyon » (Robet Parisot) , lequel, en ce XXIe siècle, porte d'ailleurs toujours le titre de « Primat des Gaules » en vertu de l'ancienneté de son siège et de l'autorité qu'il a exercée par le passé sur les autres évêques de France.
           C'est seulement après 313 que des progrès décisifs interviendront dans l'évangélisation de la Gaule. « Deux évènements ont une importance particulière dans l'histoire du christianisme : c'est d'abord l'édit de Milan, par lequel Constantin, en 313, accorda aux chrétiens le droit de pratiquer ouvertement leur culte. L'Etat romain témoignera dès lors de la bienveillance pour la religion du Christ, en attendant qu'avec Gratien et Théodose (380 / 395), et c'est là le second fait de grande conséquence, il la protège et en fasse une religion officielle. » [dans « Histoire de la Lorraine » / Robert Parisot]
           Les édits de Théodose et de ses successeurs eurent pour résultat d'augmenter rapidement le nombre
de chrétiens, « mais que valaient ces nouveaux convertis ? » se demande Robert Parisot. « Il n'y avait de leur part qu'une adhésion apparente à la doctrine évangélique, dont ils se contentaient de pratiquer extérieurement le culte, sans se soucier de conformer leur vie aux préceptes du Christ. Restés païens dans le fond de leur âme, ils introduisirent dans l'Eglise toutes leurs vieilles superstitions, dont quelques-unes ont persisté jusqu'à nos jours. D'autre part, les avantages matériels que l'Eglise retirera de la protection de l'Etat ne manqueront pas de tenter l'ambition et la cupidité ; si l'on recherche les hautes charges de l'Eglise, c'est à cause des honneurs et des richesses qu'elle procure. L'Etat interviendra dans la désignation des prélats, nommera ou fera nommer ses protégés, même quand ils seront indignes de l'épiscopat. Aussi de très nombreux évêques se montreront-ils beaucoup plus préoccupés d'intérêts temporels que de leurs devoirs spirituels. » (Robert Parisot)
           Après 313 furent édifiés ouvertement les premiers lieux de culte chrétiens, ce qui apporta un changement fondamental dans le paysage monumental. La roue tournant, ce furent les chrétiens qui, de persécutés, devinrent persécuteurs : des groupes s'attaquèrent aux temples anciens, brisant des statues et des frises inspirées de la mythologie, profanant les objets de culte, comme à Sarrebourg. « Ainsi furent découverts des éléments brisés et jetés au fond d'un puits d'un Cavalier au Géant (…) A Sarrebourg, cette action daterait au plus tard du début du IVe siècle : elle serait peut-être même antérieure à l'édit de tolérance de 313 et permettrait d'admettre l'existence d'un groupe de chrétiens assez nombreux et assez actifs pour passer eux-mêmes impunément à des actes de persécution. De même, mais plus tard, vers 395, le Mithrée (temple dédié à Mithra, dieu perse) a été profané par des chrétiens qui avaient non seulement brisé l'autel mais qui avaient aussi volontairement souillé le sanctuaire en y plaçant un cadavre ; le culte ne pourrait donc plus jamais y être célébré. » [dans « Histoire de Sarrebourg » / ouvrage collectif / J-M. Demarolle et M. Lutz]
           En 435, l'empereur Valentinien III jugea nécessaire de rendre à ce sujet un décret très sévère : « Nous voulons que les sanctuaires, les temples, s'il en reste encore, soient détruits par l'ordre des magistrats, que sur l'emplacement même on élève le signe de la religion chrétienne comme une expiation. » Le décret impérial a-t-il été appliqué dans le fin fond des campagnes gauloises ? Rien n'est moins sûr, du moins si l'on en juge ce message qu'adressa à la fin du siècle suivant, en 597, le pape Grégoire Ier à la reine d'Austrasie Brunehaut : « Tu dois contraindre tes sujets à se soumettre à la discipline de l'Eglise, en sorte qu'ils n'immolent plus aux idoles, n'adorent plus les arbres, et qu'ils n'étalent plus en public les têtes des animaux dont ils ont fait des sacrifices impies. Nous sommes même informé que plusieurs chrétiens continuent, chose abominable, à rendre un culte aux démons. »
           La condamnatio
n par l'Eglise des fêtes et réjouissances païennes provoqua de la part de la population rurale la plus véhémente des réactions, si l'on en croit le récit édifiant du biographe de Saint Eloi, élu évêque de Noyon et de Tournai en l'an 641 : « Un jour, Eloi en tournée pastorale exhortait les paysans à rejeter tous les divertissements abominables des démons, danses, etc, et toutes les vaines superstitions. Les paysans souffraient avec impatience cette prédication. Dans leur irritation, ils formèrent le projet de massacrer l'évêque s'il revenait. Eloi fut informé de ce projet. Il se présenta au milieu de la foule et, gravissant un monticule situé devant l'église, il commença à la haranguer encore plus énergiquement. Les paysans couvrirent l'orateur d'injures et se mirent à crier : Jamais, Romain que tu es, bien que tu nous rabâches perpétuellement la même chose, tu ne pourras abolir nos coutumes. Nous célébrerons nos solennités comme nous l'avons fait jusqu'ici et il n'y a personne au monde qui puisse nous interdire nos divertissements antiques qui nous sont si chers ! » [dans « Vita Eligii »]
           « C'est dans le domaine religieux que l'âme celtique est restée la plus vivace, et ce bien au-delà des siècles gallo-romains », affirme Alain Simmer, historien mosellan. « Des divinités indigènes, parfaitement inconnues dans le monde romain, restaient bien enracinées un peu partout en Lorraine mosellane : le dieu-cavalier à l'anguipède, les déesses-mères, etc … sans oublier une multitude de petites divinités locales, témoignage de la religiosité et du particularisme gaulois. (…) La lenteur de la christianisation, qui ne prend de l'ampleur dans les campagnes qu'à la fin du VIIe ou au début du VIIIe siècle, traduit une résistance des mentalités et la stabilité des croyances ancestrales. L'ancienne religion reste parfois en honneur jusqu'en plein VIe siècle. Plutôt que de détruire (certaines statues) on recommandera de transformer les temples païens en lieux de culte chrétiens. Saint Martin, le héros gaulois par excellence, ne sera certainement pas vénéré par hasard comme guérisseur et maître des sources miraculeuses.
Le danger viendra bien plus des vieilles pratiques magico-religieuses indigènes, que l'Eglise n'a jamais pu éradiquer, comme le démontrent les exhortations des autorités ecclésiastiques, constamment renouvelées jusqu 'au Xe siècle au moins. (…) Elles restent bien souvent à la base de nombreuses traditions rurales et des fêtes populaires. Et dans ce domaine, force est de reconnaître que la pérennité gauloise, soit en adaptant divinités et lieux de culte, soit en conservant ses traditions vernaculaires, est restée bien souvent la plus forte, enjambant allègrement le christianisme et les époques romaine et mérovingienne. »

      

 

 


Les circonscriptions ecclésiastiques



           L'Eglise s'organisa en suivant le modèle administratif de l'Empire romain, les limites des « civitates » gauloises devenant les limites des évêchés, lesquelles demeurèrent quasi intactes jusqu'en 1790, dans la majorité des cas. Il y eut un évêque au chef-lieu de chaque cité, à Metz donc en ce qui concerne la cité des Médiomatrices. A l'origine seul le chef-lieu de la cité eut un édifice dans lequel la communauté pratiquait le culte, bâtiment qui prendra par la suite le nom d'église. Les « vici », bourgades disséminées dans le territoire de la cité, et les grands domaines ruraux finirent sans doute par avoir aussi leurs chapelles. On sait peu de choses sur les premiers évêques des IVe et Ve siècles, et encore moins en ce qui concerne les prêtres, les diacres et les autres clercs qui servaient d'auxiliaires aux évêques.

           Au Ve siècle, la province romaine nommée Première Belgique fut partagée en quatre diocèses : Trèves, Metz, Toul et Verdun. Le Pays de Sarrebourg faisait alors partie du diocèse de Metz, et y demeurera jusqu'à nos jours.




Du IIIe siècle au milieu du Ve siècle : des temps difficiles.
Invasions ou migrations ?




           La période de paix, de prospérité et d'équilibre nommée « pax romana » se termina en Gaule du Nord-Est vers le milieu du IIIe siècle après J-C. A partir de 253, avec cependant une brève accalmie entre 290 et 340, et jusqu'en 451 où les Huns détruisirent une grande partie de la ville de Metz, les raids des Germains, qu'ils soient Alamans, Alains, Suèves ou Francs, puis l'implantation de ces tribus dans la région qui s'appellera Lorraine, s'accompagnèrent de pillages, de destructions et de violences, liés au va-et-vient des envahisseurs et des armées. Les archéologues notent pour cette période de nombreux indices de batailles et d'incendies qui témoignent de l'insécurité que connurent les Gallo-romains. Certains d'entre eux cachèrent leurs avoirs monétaires dans l'espoir de jours meilleurs … qui ne vinrent jamais. Des trésors enfouis hâtivement seront mis à jour bien des siècles plus tard : ici, 10.000 pièces d'argent ; là, 2.000 pièces de bronze ; 200 pièces d'or ailleurs ; 17.000 monnaies diverses enfermées dans quatre pots de céramique. Un vigneron enterra tout son outillage, retrouvés à Tarquimpol (Moselle) au XXe siècle. Un vigneron de Tarquimpol (Moselle) enterra tout son outillage, dans l'espoir sans doute de retrouver son bien quand les beaux jours seraient revenus : « En mai 1951 fut mis à jour, à Tarquimpol, tout le « ménage » d'un artisan gallo-romain. Il paraît probable que ce dernier, à l'approche de quelque invasion barbare, avait voulu cacher en terre ses outils, avant de prendre la fuite. A la profondeur de 0,80 m, il avait placé un chaudron de cuivre qui contenait à la fois des ustensiles d'un viticulteur (en bronze : passoire, plat, entonnoir et trois « mesures » pourvues de crochets de suspension), ceux d'un agriculteur (en fer : deux socs de charrue et une enclume) et ceux d'un bûcheron (cinq haches ou herminettes de types variés, trois gouges, une scie, des chaines avec crochets pour lier les troncs d'arbre. En guise de couvercle, un second chaudron retourné, protégeait tout ce matériel. L'absence de monnaie ou de céramique empêche de donner une date à ce matériel qui peut remonter au IIIe ou au IVe siècle » [article Gallia / année 1953 / Antiquités historiques]
           Les expressions « Grandes Invasions » ou « Invasions barbares » sont traditionnellement utilisées par les historiens de langue française pour désigner les invasions et migrations de peuples qui ont affecté le territoire de l'Empire romain, dont la Gaule bien sûr, entre la fin du IVe et le VIIe siècle. Leurs confrères de langue germanique préfèrent quant à eux employer le terme de « Völkerwanderungen », que l'on peut traduire par « mouvements de populations », termes qui ont l'avantage de mieux définir ce brassage humain qui devait aboutir à l'Europe médiévale.
           « Des esprits sim
plistes se présentent volontiers le monde romain et le monde barbare comme deux masses séparées par un mur élevé, et les grandes invasions comme la rupture d'une digue qui aurait fait couler à flots les Barbares dans l'Empire, déclare l'historien Robert Latouche. Imagination enfantine qui a été écartée depuis longtemps, mais qui continue à hanter certains cerveaux. La vérité est que depuis des siècles, des contacts avaient été établis entre l'Empire romain et la Germanie. Des marchands s'étaient aventurés au-delà du Rhin et du Danube et c'est à eux, ainsi qu'à des agents impériaux chargés de missions semblables à celles que remplissent nos services de renseignements et d'espionnage, que nous devons la précieuse documentation sur les Germains par Pline l'Ancien et Tacite (…) Réciproquement les Germains ont été de bonne heure attirés par l'Empire. Dès la période julio-claudienne, ils ont commencé à boucher les trous de l'armée. » [dans « Aspect démographique de la crise des grandes invasions » / Robert Latouche]
           Hormis dans la Gaule Belgique où les diverses cités de la rive gauche du Rhin combattirent régulièrement les Germains leurs voisins, on ne connut d'abord de ces peuples que leurs guerriers faits prisonniers par les armées de Jules César. Ils se voyaient expédiés à l'intérieur de l'Empire pour y être employés à des travaux d'utilité publique, en particulier pour la mise en valeur des terres incultes ou désertes dont l'Etat voulait tirer profit. Ils subsistaient du produit de ces terres tout en payant des redevances au fisc, et avaient toutes les charges qui pesaient sur les contribuables indigènes. Il s'agissait au début de terres d'Etat. Puis, à la demande de certains propriétaires fonciers qui se plaignaient de manquer de main d'œuvre, l'administration romaine leur attribua une partie de ces nouveaux colons. Cette faveur se généralisa et devint pratique courante au cours des décennies qui suivirent la conquête de la Gaule. C'est ainsi que des « Barbares » - terme signifiant initialement que ces hommes n'étaient ni Romains ni Grecs - se sédentarisèrent parmi les populations indigènes gauloises, les diverses cultures finissant par s'interpénétrer.
           Un autre mode d'admission des Germains en Gaule fut le traité librement consenti, le « foedus », qui autorisait l'implantation d'une tribu sur des terres romaines. Le peuple fédéré s'installait de façon indépendante, avec ses lois et ses dirigeants, et n'était pas soumis à la loi romaine. L'Empire obtenait ainsi une paix relative avec ces peuples « barbares » fédérés, qui lui fournissaient des troupes combattives si nécessaire. C'est ainsi que se constituèrent des groupements de tribus cantonnés dans des territoires plus ou moins bien délimités : des groupes de Wisigoths, de Burgondes, d'Alamans, d'Alains, de Francs, entre autre, tous peuples originaires de la Germanie voisine, eurent le titre de « peuple fédéré ».
           En 358, un tel traité d'alliance fut passé avec les Francs, nom qui ne désigne pas un seul peuple, mais qui sert à nommer une fédération de tribus germaniques qui avaient, depuis le Ier siècle, pris part épisodiquement aux luttes contre Rome : Sicambres, Chamaves, Bructères, Chattes, Usipètes, et sans doute d'autres encore. Les différents peuples francs, quoique ligués entre eux et tout en portant le même nom, ne formaient pas une nation compacte avec gouvernement central et administration uniforme. Avec la plus grande facilité et sans inconvénient, ils entraient dans la confédération, s'en détachaient pour y revenir de nouveau suivant les hasards de la guerre et les nécessités du moment. Chaque tribu conserva une indépendance relative, son propre gouvernement, ses particularités, ses lois et coutumes. En principe, le but de la ligue paraît avoir été la guerre défensive et offensive; mais souvent il n'était autre que le pillage, ou simplement la satisfaction de leur goût pour les aventures et au besoin la conquête de terres étrangères.
           Le nom de « Francs » semble être cité pour la première fois à propos d'événements de 241 et, à partir des années 275-280, les Francs sont régulièrement mentionnés comme s'opposant aux Romains sur la rive droite du Rhin. Avec le statut de « foederati », ils se virent octroyer la Toxandrie, région de la Belgique Seconde, comprise entre l'Escaut et la Meuse, correspondant au Brabant septentrional de l'actuelle Belgique. Bien vite, certains Francs accédèrent aux postes les plus élevés de la hiérarchie militaire romaine.
          Au Ve siècle, vers 428 / 431, le roi Chlodion le Chevelu établit une partie des Francs, dénommés Francs Saliens, autour de Cambrai où il fonda un royaume dont devait hériter son fils présumé Mérowig, lequel donna naissance à la dynastie des Mérovingiens. Le plus illustre des rois issus de cette lignée fut Chlodowig ou Chlodowech, né vers 466, qui sera roi de tous les Francs de 481 à 511 sous le nom de Clovis Ier. Les descendants de Clovis régnèrent pendant trois siècles, avant de laisser la place à Charlemagne et aux Carolingiens.

 

Deux  siècles   de  misère  pour  le   Pays  de  Sarrebourg

 


          « Même si l'Empire romain fut aux prises avec de sérieuses difficultés dès la fin du IIe siècle, c'est à partir du milieu du IIIe que la Gaule du Nord-Est et donc le Pays de Sarrebourg ont connu, sans beaucoup de répit, invasions, troubles, incendies, pillages, destructions et ce jusqu'à la fin du Ve, époque où l'autorité des souverains francs s'impose et apporte enfin une certaine stabilisation. (...)
Les conquêtes brutales, accompagnées de pillages et de destructions violentes bien attestées, ne doivent pas faire oublier des installations plus lentes : elles ne font en effet que s'ajouter à une pénétration plus échelonnée, à des contacts plus pacifiques d'interpénétration, qui ne pouvaient manquer d'exister dans un pays proche des deux Germanies. Déjà à l'époque de César, les Trévires (cité ayant Trèves pour chef-lieu), si proches voisins des Médiomatriques de Pons Saravi (Sarrebourg) comportaient une forte proportion de Germains venus d'outre-Rhin ; n'oublions pas non plus que bien des gens de la région ont dû servir comme auxiliaires dans les armées (romaines) du Rhin ; et enfin, le pouvoir lui-même installa au IIIe et au IVe siècles des milliers de captifs germaniques pour mettre en valeur les terres dévastées de la Gaule du Nord-Est. Ces divers éléments expliquent que les « invasions » au sens strict du terme ne sont qu'un « épisode », malheureusement le plus terrible et le plus spectaculaire, de la compénétration progressive de deux civilisations. Invasions germaniques dans le Pays de Sarrebourg, mais qui sont ces Germains ? Des Alamans et des Francs.
Au milieu du IIIe siècle, l'Empire romain traverse une grave crise d'anarchie interne, qui a pour effet de dégarnir la frontière du Rhin d'une partie de ses troupes. Alors se placent, en 253, les premières incursions des Alamans et des Francs de Germanie libre ; pendant un siècle, elles ne font que se renouveler, selon le même itinéraire, le seuil de Saverne et la route Saverne-Metz par Sarrebourg, en ce qui nous concerne. Même si elles deviennent de plus en plus fréquentes et hardies, en dépit de quelques périodes d'accalmie (environ 290-340), elles s'apparentent encore essentiellement à des raids. Il en va tout autrement à partir de 352 où quarante cinq villes furent alors occupées, tandis que les captifs gallo-romains se voyaient envoyés au-delà du Rhin. Il faut donc imaginer pour les habitants de Pons Saravi, dans un pays meurtri, une insécurité et des menaces permanentes, le va-et-vient des envahisseurs avec son cortège de pillages, celui des armées avec son cortège de réquisitions, défilés des prisonniers de guerre.
Avant de disparaître « officiellement » en 476, l'Empire Romain d'Occident n'a plus pendant bien des années qu'une autorité théorique sur la Gaule du Nord-Est et les Germains sont occupés à s'installer définitivement : l'heure n'est plus au combat entre Romains et Germains, mais entre Germains eux-mêmes pour une implantation définitive ! C'est ainsi que les Alamans se sont fixés dans la vallée de la Sarre dès la première moitié du Ve siècle mais, battus par Clovis, sans doute vers 506, ils ne purent garder que la plaine du Rhin et laissèrent donc le Pays de Sarrebourg à des établissements francs. »
[dans « Histoire de Sarrebourg » / ouvrage collectif / J-M Demarolle et M. Lutz]
          Commencera alors pour le Pays de Sarrebourg, ses grandes « villae », ses petits établissements ruraux disséminés dans la campagne et les premiers villages qui étaient en train d'émerger ici et là, cette troisième étape évoquée par l'historien Gérard Walter, qui s'exprimait ainsi : « La voie qui conduisit le paysan gaulois jusqu'aux portes de la seigneurie féodale passait par trois étapes : romanisation, évangélisation, germanisation. » Officiellement, si l'on en croit la majorité des ouvrages traitant du sujet, la société gallo-romaine sera alors « germanisée » par les Francs qui s'établiront parmi la population indigène, imposant leur culture et leur langue. De nombreuses voix s'élèvent cependant pour contredire cette thèse de la « germanisation » brutale et généralisée des campagnes aujourd'hui qualifiées de lorraines. C'est ainsi que l'historien mosellan Alain Simmer qualifie d'« idée reçue » le fait d'attribuer la germanisation d'une partie de l'actuelle Lorraine à « l'action d'envahisseurs-colonisateurs », lesquels, au VIe siècle auraient instauré en cette province de l'Est une frontière linguistique qui subsiste encore, « imprimant à la langue et au paysage mosellans un sceau indélébile ».
          « En Lorraine, on découvre une province proprement coupée en deux, gallo-romaine d'une part, germanique de l'autre.(...) Le germanisme lorrain reste confiné à certaines zones manifestement déjà délimitées par une frontière linguistique qui ne doit rien à l'Austrasie ni à l'empire de Charlemagne. Cette frontière des langues (...) ne constitue pas la ligne d'arrêt entre deux peuples opposés par la race et leur civilisation. (…) Elle représente à l'évidence la limite de deux zones linguistiques distinctes, mais elle concrétise la résurgence d'un germanisme originel, rendue possible par la désagrégation de la Mosella Romana, processus étalé sur plusieurs siècles, instaurant ou rétablissant un bilinguisme de longue durée. La frontière des langues n'est donc qu'une ligne de contact ancestrale, et pas un symbole d'affrontement systématique de deux blocs linguistiques. (…) Ce qui a été interprété comme une germanisation graduelle, aboutissant in fine à la formation de la frontière des langues n'est que l'expression de la survie d'un système ancestral. Tous les pseudo-changements linguistiques relèvent en fait de ce bilinguisme, dû à la résurgence d'une langue ancienne, ponctuée par des variations de la frontière des langues et des fluctuations linguistiques.(...) Seule une continuité de peuplement et de culture a pu justifier le maintien d'une langue germanique en Moselle. L'implantation d'un germanisme extérieur s'est avérée impossible : un processus de transmission de la langue germanique autrement que par une existence autochtone et ancestrale est proprement chimérique. (…) Tout démontre une superposition de la romanité sur un substrat populaire gallo-germanique et non pas la superposition d'un germanisme d'envahisseurs sur la civilisation galllo-romaine. » (Alain Simmer)

 

Epilogue


          A partir du Ve siècle, toute la population du Pays de Sarrebourg, dans laquelle sont bien sûr comprises les familles exploitant les terres aujourd'hui hessoises, participera à la lente naissance d'un nouveau type de civilisation. Celle-ci ne fera pas table rase des cinq siècles de civilisation gallo-romaine l'ayant précédée, non plus d'ailleurs qu'elle ne fera disparaître le fonds celtique qui subsiste dans les entrailles de la masse rurale, « viscéralement attachée à sa terre, quels que soient les maîtres et leurs langues. »
        
Cette nouvelle civilisation prendra quatre à cinq siècles avant de se mettre en place, aboutissant à la féodalisation de la société dont les composantes ethniques sont multiples, déposées les unes parmi les autres, dans un grand « melting-pot » - expression si chère aux Américains du Nord - ou bien les unes sur les autres comme les couches d'un mille-feuilles : celte, belge, médiomatrice, barbare, germain, franc, et encore d'autres, qui sait ...
          « Le haut Moyen Age, bâti sur l'héritage antique, se limite à des mutations politiques, sans révolution ethnique. (...)
L'histoire de la
Gaule romaine a beau crouler sous les invasions successives, les délimitations ancestrales du pays survivront à tous les bouleversements. (...)
Le fonds indigène revivra lentement, tout en se maintenant dans un cadre de vie romain, mais de plus en plus estompé à mesure que l'on s'engage en zones rurales. (…)
La romanisation n'a fait qu'effleurer les masses rurales où survivaient langue et coutumes, jamais combattues ou opprimées, simplement amenuisées de manière naturelle devant les progrès de la civilisation romaine. Loin du renversement massif comme le sous-entendait une germanisation née au haut moyen Age, c'est un simple retour des valeurs traditionnelles en douceur. (…)
Tout démontre aussi, aux Ve et VIe siècles, que le vernis romain s'estompe lentement, mais sans jamais vraiment s'effacer, les structures essentielles restant en place, au profit de l'élément celto-belge qui reprend le dessus, soumis à une influence franque dont l'impact véritable est bien difficile à quantifier. »
(A. Simmer)




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