l' église saint Laurent au cours des siècles ( 3)
QUE SAVONS - NOUS D ' AUTRE ?
Les plus anciens des paroissiens hessois se souviennent s'être agenouillés devant un banc de communion pour recevoir l'hostie que le prêtre déposait sur la langue du communiant. Le banc était en fer forgé, avec des motifs représentant des calices, des grappes de raisin et des épis de blé. Ils ont aussi le souvenir de lustres en tôle travaillée, garnis de cierges. Que sont devenus ces objets mobiliers ?
Pas de trace non plus des deux grands vitraux, hauts de plusieurs mètres, très colorés et représentant des personnages, qui ornaient les ouvertures situées au-dessus du magnifique œuvre sculpté sur la paroi intérieure du bras droit du transept. On sait qu'ils furent mitraillés au cours de la deuxième guerre mondiale. Après la Libération, bien qu'abîmés, ils restèrent encore en place pendant quelques années. A la fin des années 40, sans plus de précision, la municipalité de Hesse prit la décision de les faire réparer. Les vitraux furent donc démontés, rangés dans des caisses en bois et remplacés par des morceaux de verre transparents, provisoires, qui pourtant sont toujours en place en 2016. Les caisses furent entreposées durant quelque temps au-dessus de l'atelier municipal. Puis les vitraux furent envoyés à quelque part pour être restaurés. Où ? A quelle date ? Qui saura localiser l'endroit où dorment les vitraux de l'église Saint Laurent de Hesse ?
XXIème SIÈCLE
Le 26 avril 2016, Gérard Fleurence, maire, « considérant les dangers pour la sécurité publique, et notamment pour la sécurité des usagers de l'orgue de l'église, que présentent le risque d'effondrement de l'escalier, sa pente et son garde corps totalement hors normes » prit un arrêté dont voici le premier article : « L'accès à l'escalier externe de l'orgue de l'église est interdit à toute personne non habilitée par le maire ». L'escalier extérieur donnant accès à la tribune et à l'orgue est désormais condamné. Il restera toutefois en place, car, bien que les marches en pierre de grès soient usées, parfois descellées du mur, elles font partie du monument classé. Cet antique escalier vient d'être remplacé par un escalier intérieur métallique, de forme hélicoïdale, entouré d'une cage métallique ajourée, dont les motifs rappellent ceux ornant la tête des bancs ainsi que la balustrade de la tribune. Il a été installé dans le fond de la travée droite. La construction de ce mobilier monumental n'a pu se faire sans l'aval de la Direction régionale des affaires culturelles et de son conservateur des monuments historiques. Le nouvel escalier a été conçu par le cabinet d'architecture Oziol - De Micheli de Strasbourg, dont la direction est assurée par des architectes du patrimoine, qualification indispensable pour intervenir dans l'aménagement d'un site patrimonial. La structure métallique - axe central, marches et garde-corps - a été réalisée par la Métallerie Nouyrit de Furdenheim (67), entreprise renommée, spécialisée depuis de nombreuses années dans les interventions sur les monuments historiques classés ou non, tant en restauration pure qu'en réalisation à neuf d'éléments à remplacer et d'éléments métalliques contemporains intégrés. Un informaticien de qualification spéciale a été chargé de la programmation du laser intervenant dans la découpe du métal. La pièce unique qui a été réalisée par ce ferronnier d'art talentueux figure en bonne place de la galerie de photos du site Web de l'entreprise, dont sont extraites les images ci-dessous.
Le remplissage des marches avec du bois a été confié à la société ABF-Menuiserie de Merten (57), dont le patron, M. Baillot, est réputé pour son travail de haute qualité. L'artisan a été formé pendant huit ans par les Compagnons du devoir qui, au cours de son Tour de France, lui ont transmis les valeurs éthiques du travail bien fait et lui ont permis d'acquérir une très haute compétence technique. Le nouvel escalier intérieur de notre église est une œuvre d'art contemporaine unique, dessinée et réalisée par des personnes qui disposent de savoir-faire complexes, élaborés et nombreux, des artisans qui se révèlent être des artistes, des gens de l'art : art du dessin, art de la construction, art du métal, art du bois. Personne ne peut nier que ce meuble à vocation utilitaire allie technicité et esthétique. Mais nul n'est obligé d'apprécier l'objet volumineux qui s'impose à lui lorsqu'il entre dans l'église, comme nul ne peut être contraint d'admirer les têtes de chapiteaux sculptées ou les voûtes romano-gothiques. Gardons-nous cependant de confondre art et sentiment personnel, de confondre les œuvres d'art dans leur ensemble avec celles que nous apprécions, de croire que les œuvres que nous n'aimons pas ne sont pas des œuvres d'art : on n'est pas sommé d'aimer tout ce qui se fait en la matière, mais on ne doit pas rejeter en dehors de l'art des œuvres pour la seule raison que nous ne les comprenons pas ou qu'elles nous heurtent.
La question qui pourrait se poser serait la suivante : art ancien et art contemporain peuvent-ils coexister dans notre église abbatiale de style romano-gothique ? La construction de cet escalier dans cet édifice n'est pas du goût de tout le monde. « Du moderne dans notre vieille église ? C'est n'importe quoi ! C'est pas dans le style ! » disent ou pensent les plus modérés, quand de plus virulents crient au scandale, voire au sacrilège. Et pourtant ce n'est pas une première … Les reconstructions et restaurations diverses qui intervinrent dans l'édifice depuis les Xe et XIe siècles furent toutes, à leur époque, des réalisations « contemporaines ». Idem pour les divers objets et mobiliers qui y furent introduits au cours des siècles. Invoquer la période historique, l'homogénéité et la cohérence de l'ensemble ne saurait être une justification suffisante pour censurer tout nouvel apport de style contemporain. Notre église paroissiale n'est pas intemporelle ; elle est un tout ; son identité actuelle résulte des apports faits au cours des époques précédentes. Le débat sur le bien-fondé de l'inclusion d'éléments modernes dans une architecture ancienne n'a pas lieu d'être, puisqu'il est appuyé par les spécialistes qui veillent sur la conservation des monuments historiques protégés. Ils ont estimé que l'époque actuelle pouvait légitimement apposer sa marque sur l'église de Hesse, et ce parce que tous les siècles antérieurs ont apposé la leur. Plutôt que de se prononcer sur la congruence avec l'espace investi, ils ont retenu la valeur intrinsèque de la proposition artistique. Nombre d'œuvres qualifiées de modernes ont été critiquées en leur temps par des esprits chagrins : les vitraux de Pierre Soulages à Conques, ceux de Marc Chagall à Reims, le plafond de l'Opéra Garnier à Paris, la Tour Eiffel, la Pyramide du Louvre ; la liste pourrait être allongée à l'infini ! Alors, ne soyons pas rigides et obtus ! L'art contemporain a sa place à Hesse, que l'on soit pour ou contre l'esthétique. Chaque époque eut sa querelle des anciens et des modernes. Tout passe … et devient le passé. Il est à souhaiter que la curiosité attire dans notre village les visiteurs voulant se faire une idée par eux-mêmes. L'église Saint Laurent est un monument qui mérite d'être connu. « Ouvrons plutôt les yeux et regardons autour de nous, dans notre voisinage immédiat : les étrangers avertis ne s'y trompent pas quand le hasard les y guide ; oui le hasard, car nulle part grande mention n'en est faite, sinon dans les travaux des spécialistes. Un effort de mise en valeur de nos plus beaux édifices doit donc être fait. » déclarait en 1968 Marcel Lutz, alors conservateur du Musée de Sarrebourg.
Ce gisant représente peut-être la comtesse Helwige de Dabo ou plus vraisemblablement la comtesse Mathilde, sa belle-fille, désignée en tant que fondatrice de l'établissement religieux, puisque c'est très certainement elle qui a achevé au XIème siècle la fondation commencée par Louis de Dabo vers l'an 1000.
Bibliographie
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